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Correspondance avec M. Michel Thys

Correspondance avec M. Michel Thys

Table des matières

(4 premiers courriels omis)
1) M. Thys (2007-décembre-18)
2) S. Jetchick (2007-décembre-19)
3) M. Thys (2007-décembre-19)
4) S. Jetchick (2007-décembre-19-2)
5) M. Thys (2007-décembre-20)
6) S. Jetchick (2007-décembre-21)
7) M. Thys (2007-décembre-22)

1) M. Thys (2007-décembre-18)

-----Original Message-----
From: Michel THYS
Sent: 18 décembre 2007 12:44
To: Stefan Jetchick
Subject: Re: Débat par courriels affichés sur l'Internet

>> >> je serais heureux de lire un commentaire, et surtout une
>> >> critique, de votre part à propos de mes conceptions.
>>
>> Je m'excuse. Je n'ai pas été assez clair dans mon courriel
>> précédent.
>>
>> Je vais poser ma question de nouveau:
>>
>> 		Voulez-vous, oui ou non, avoir un débat par courriels
>> 		avec moi, affiché sur l'Internet?

C'est moi qui m'excuse : j'avais perdu de vue votre proposition. Je
suis bien sûr d'accord d'avoir un débat avec vous sur Internet, comme
j'en ai eu un, mutatis mutandis, avec André TARASSI.

Etant entendu qu'en ce ce qui me concerne, je ne cherche pas à
convaincre ni à avoir raison, même si j'en donne parfois
l'impression, mais seulement à ouvrir éventuellement d'autres
horizons à ceux et celles qui y aspirent. Je présume qu'il faudrait
aborder successivement différents thèmes ou sujets de réflexions.

Voulez-vous commencer en abordant l'un ou l'autre de votre choix?
Personnellement, à un moment ou à un autre, je souhaiterais discuter
avec vous de l'influence de l'éducation religieuse précoce sur
l'esprit critique ultérieur en matière de foi : vous aurez compris
que c'est l'un de mes dadas ... En effet, les discussions de
philosophie pure du 19e siècle ne m'intéressent plus. Mais ce
pourrait être aussi le sujet d'un autre débat.

Michel THYS

2) S. Jetchick (2007-décembre-19)

-----Original Message-----
From: Stefan Jetchick
Sent: 19 décembre 2007 10:09
To: Michel THYS
Subject: RE: Débat par courriels affichés sur l'Internet

Rebonjour M. Michel THYS,

Désolé de ma lenteur à vous répondre.


>> Je suis bien sûr d'accord d'avoir un débat avec vous sur Internet, comme
>> j'en ai eu un, mutatis mutandis, avec André TARASSI.

Ah! Merci! C'est un beau cadeau de Noël! Le seul bémol est que,
comme je vous l'ai dit, j'ai déjà engagé tous mes fonds dans
un débat contre M. Guillaume Loignon, alors je ne pourrai
pas vous payer pour votre beau cadeau de Noël. Désolé.


>> Étant entendu qu'en ce ce qui me concerne [je cherche] seulement
>> à ouvrir éventuellement d'autres horizons à ceux et celles qui y
>> aspirent.

Excellente intention, que je fais mienne.


>> Je présume qu'il faudrait
>> aborder successivement différents thèmes ou sujets de réflexions.

En effet, nous pourrions sûrement trouver plusieurs sujets
sur lesquels nous ne nous entendons pas.


>> Personnellement, à un moment ou à un autre, je souhaiterais discuter
>> avec vous de l'influence de l'éducation religieuse précoce sur
>> l'esprit critique ultérieur en matière de foi

Ce sujet m'intéresse vivement, moi aussi.

La seule raison pour laquelle j'hésiterais à commencer par
ce sujet, c'est le premier paragraphe mystérieux du premier
texte que vous m'avez envoyé:

	"On peut considérer que la «vérité» est, soit absolue,
	révélée, «subjective» et fondée sur le vécu, soit qu'elle est
	«objective», partielle, personnelle, provisoire, et fondée
	sur l'observation scientifique et l'expérience, en fonction
	d'éventuels éléments nouveaux."

Si nous voulons avoir un débat constructif, nous devons sérier
les problèmes correctement. Par exemple, il ne sert à rien
de s'habiller pour aller travailler, avant d'avoir pris sa douche!
De la même manière, selon moi, il ne sert à rien de débattre
de «l'influence de l'éducation religieuse précoce sur l'esprit
critique», si vous et moi ne nous entendons pas sur ce qu'est
«l'esprit critique» et la vérité!

Je suggère donc que nous commencions le débat par votre
premier paragraphe mystérieux (en d'autre mots, par la question
de «l'épistémologie» ou «critériologie»).

Qu'en pensez-vous?

Au plaisir,

Stefan

3) M. Thys (2007-décembre-19)

-----Original Message-----
From: Michel THYS
Sent: 19 décembre 2007 12:57
To: Stefan Jetchick
Subject: Re: Débat par courriels affichés sur l'Internet

Bonjour Monsieur JETCHICK,

Autant, quant au fond, je suis d'accord sur le principe d'avoir un
débat d'idées avec vous, autant, quant à sa forme, je dois vous
faire part de plusieurs réticences.

1. Lorsque, dans un débat tel que celui que j'ai eu avec André
TARASSI, ma "qualité" de franc-maçon apparaît, avec mon accord,
certes, mais à mon corps défendant parce qu'en désaccord avec mon
souci de discrétion, je tiens à faire préciser que "Je ne m'exprime
évidemment qu'en mon nom personnel, et non en celui des membres du
Grand Orient de Belgique. S'ils partagent les principes et le
valeurs qui m'animent, ils ont chacun leur propre perception du
phénomène sectaire" ( en l'occurence). En outre, ce débat avait
consisté seulement à commenter mon texte "Croire ou ne pas croire,
that 's the question! Choisit-on vraiment? ".

2. L'aspect qui me dérange le plus, c'est celui d'un "concours",
d'une compétition, avec un éventuel prix à gagner, le fait d'envoyer
une photo, de désigner trois arbitres qui décideront de la
"victoire" ou de la "défaite" de l'un ou de l'autre, en bref le côté
ludique plutôt qu'intellectuel d'un tel débat ... Cela ne me
convient pas du tout. Et cela parce que, comme je vous l'ai écrit,
je ne cherche jamais à convaincre, ni à avoir raison, même si je
peux parfois donner l'impression du contraire. En plus, je ne
supporte pas le prosélytisme, d'où qu'il vienne ...! C'est dans la
logique de l'optique maçonnique, dans les loges a-dogmatiques,
s'entend : personne n'y estime détenir plus d'une parcelle de
vérité, et encore : c'est présomptueux! Chacun peut, sur un sujet
donné, exprimer ses conceptions, écouter celles des autres, et se
forger ainsi sa propre "vérité", partielle, provisoire et
personnelle. Pas question de chercher à se convaincre mutuellement!
Nous sommes tous d'accord avec ce "modus operandi", depuis 1717 ...

3.Vous écrivez que les athées devraient "faire des efforts
raisonnables et charitables pour libérer les chrétiens de leur
erreur". Mais non, ils ne sont pas dans l'erreur : simplement, ils
raisonnent autrement et l'idéal serait qu'ils puissent découvrir,
sans dirigisme aucun, des informations alternatives susceptibles de
remettre en question leurs opinions. Le fait de vous voir
recommander certaines lectures, au-delà de l'âge scolaire, me
dérange beaucoup, je vous l'avoue. (Ceci dit bien sûr sans contester
la nécessité d'un approche didactique, selon l'auditoire auquel on
s'adresse). A fortiori lorsqu'il s'agit de lectures unilatérales,
comme celles de THONNARD : il part en effet d'un pré-supposé,
l'existence de Dieu, ce qui hypothèque ipso facto tout le contenu de
son discours ... Je n'ai donc nulle envie de discuter inutilement
ses positions.

4. Je ne suis d'ailleurs pas philosophe : s'il est certes utile de
bien définir le sens des mots et des notions qui interviennent dans
un débat, je dois vous dire, quitte à vous décevoir, qu'à mes yeux,
mais je peux me tromper, les exégèses des textes théologiques,
philosophiques, religieux, historiques, littéraires, politiques, etc
...doivent actuellement être précédés, nuancés, voire revus, à la
lumière de la récente approche psycho-neuro-physio-génético-
éducative de la foi. En d'autres termes, POURQUOI certains sont-ils
croyants et d'autres pas? Et POURQUOI est-il si difficile, le plus
souvent, de changer d'avis? Selon moi, cette nouvelle manière de
chercher à comprendre le phénomène religieux, l'origine de la foi et
sa fréquente pérennité, pourrait bien, dans les prochaines
décennies, ne laisser à tous ces textes qu'un intérêt intellectuel
et historique, et modifier profondément les convictions de la
plupart des occidentaux. Pour les musulmans, totalement inféodés au
Coran, plusieurs générations, si pas plusieurs siècles, seront hélas
nécessaires. En étant optimistes ...!

5. Dialoguer avec des croyants est certes enrichissant parce que
cela permet de mieux se comprendre. Mais finalement vain, au-delà de
rares points et objectifs communs. Je préfère me consacrer à
rechercher comment, sur le plan éducatif, et donc d'abord politique,
faire en sorte que l'option laïque ne soit plus occultée, comme elle
l'est à présent dans les programmes du nouveau cours d'éthique et
culture religieuse. Depuis septembre, j'ai dialogué avec des
dizaines de promoteurs ou d'opposants à ce cours. Et je continuerai
: les francs-maçons "libéraux" savent qu'ils oeuvrent,
individuellement et en commun, à l'échelle des siècles, en faveur du
progrès humain, c'est-à-dire pour l'émancipation des hommes,
trop longtemps soumis au dogmatisme religieux, de plus en plus
hypocrite actuellement. Ici, au moins, nous sommes au moins
partiellement d'accord, me semble-t-il. Là où, je le crains, nous ne
le sommes plus, c'est lorsque j'estime nécessaire de contribuer
àfaire découvrir au plus grand nombre les fondements et les
objectifs de l'humanisme laïque, de la morale laïque, de la
spiritualité laïque (dont peu de gens soupçonnent actuemment
l'existence!), etc ....

Désolé donc de devoir décliner votre proposition de débat, dont je
reconnais pourtant que le style puisse plaire à certains : c'est moi
qui suis trop différent! Mais je reste toujours ouvert à un échange
ponctuel. Je souhaiterais savoir si les lecteurs du lien que vous
avez mentionné liront ou non ma réponse. Merci d'avance.

Bien à vous,
Michel THYS

4) S. Jetchick (2007-décembre-19-2)

-----Original Message-----
From: Stefan Jetchick
Sent: 19 décembre 2007 15:13
To: Michel THYS
Subject: RE: Débat par courriels affichés sur l'Internet

>> 1. Lorsque, [...] ma "qualité" de franc-maçon apparaît, avec mon
>> accord, certes, mais à mon corps défendant parce qu'en désaccord
>> avec mon souci de discrétion

Ah, désolé. J'ai retiré de mon site web cette mention à côté de
votre nom.

J'ai bêtement fait de la projection en me fondant sur mes
sentiments personnels. En effet, je n'hésite pas à dire que je suis
chrétien, alors j'ai pensé que c'était comme ça pour votre «qualité».


>> je tiens à faire préciser que "Je ne m'exprime
>> évidemment qu'en mon nom personnel"

OK, c'est noté!


>> 2. L'aspect qui me dérange le plus, c'est celui d'un "concours",
>> d'une compétition, avec un éventuel prix à gagner, le fait d'envoyer
>> une photo, de désigner trois arbitres

Non! Non! Je m'excuse, je n'ai pas été clair. Ce "concours" existe
bel et bien, mais vous n'en faites pas partie. C'est Guillaume
Loignon qui est le "concurrent".


>> Cela ne me
>> convient pas du tout.

OK, c'était sous-entendu que notre échange n'était pas fait avec
toute la formalité de celui que je vais avoir avec M. Loignon.
Pas besoin d'arbitre, de photo, de tralala.


>> Chacun peut, sur un sujet
>> donné, exprimer ses conceptions, écouter celles des autres

Jusqu'à maintenant, je suis d'accord...


>> et se forger ainsi sa propre "vérité", partielle, provisoire et
>> personnelle.

Ici, je cesse d'être d'accord. La vérité ne se "forge" pas, elle
se constate. Mais c'est le sujet de notre débat "épistémologique",
alors c'est normal qu'on ne s'entende pas à ce sujet. Notre
débat n'a pas encore eu lieu!


>> Mais non, ils ne sont pas dans l'erreur

Mais alors, si les chrétiens ne sont pas dans l'erreur, ils sont
dans la vérité!


>> l'idéal serait qu'ils puissent découvrir,
>> sans dirigisme aucun, des informations alternatives susceptibles de
>> remettre en question leurs opinions.

S'ils ont des "opinions", comme vous le dites, ils ne sont pas
dans la vérité!

Une opinion n'est pas vraie, elle est probable. C'est une distinction
très importante. Les très importantes distinctions entre foi, opinion
et science sont exposées ici:

	100% des religions sont fausses (à ± 1%)


>> THONNARD : il part en effet d'un pré-supposé,
>> l'existence de Dieu, ce qui hypothèque ipso facto tout le contenu de
>> son discours ...

Décidément, vous avez de la misère à lire attentivement!

Thonnard prend bien la peine de poser la question: "Dieu existe-Il?",
pour ensuite tenter d'y répondre le plus rationnellement possible,
preuves à l'appui. Il passe même de très nombreuses pages à examiner
la question de l'existence de Dieu!

	"Dieu cependant constitue un véritable problème pour la raison
	humaine laissée à ses propres forces, si bien que plusieurs
	philosophes doutent de son existence [...] C'est pourquoi [...]
	nous résoudrons en trois articles le triple problème que la raison
	peut se poser au sujet de Dieu: celui de son existence, [etc...]
	Chapitre 3. La théodicée. Problème de Dieu.

Vous pouvez être en désaccord avec ses raisonnements, mais vous
ne pouvez pas l'accuser de prendre l'existence de Dieu comme
simple présupposé.

À moins de négliger les faits et de répandre des calomnies à
son sujet...


>> les exégèses des textes [...]
>> philosophiques [...] doivent actuellement être précédés,
>> nuancés, voire revus, à la lumière de la récente approche
>> psycho-neuro-physio-génético-éducative de la foi.

Euh, est-ce que «l'exégèse psycho-neuro-physio-génético-éducative»
signifie qu'on doit ignorer ce qu'un auteur écrit, pour ensuite
l'accuser faussement?

;-)

Sérieusement, je pense que le point de départ que j'ai
suggéré pour notre débat est excellent. Voir mon courriel précédent:

	Je suggère donc que nous commencions le débat par votre
	premier paragraphe mystérieux (en d'autre mots, par la question
	de «l'épistémologie» ou «critériologie»).


>> 5. Dialoguer avec des croyants est [...] finalement vain

Euh, alors pourquoi avez-vous accepté de débattre avec moi?
J'ai de la difficulté à comprendre votre approche.


>> les francs-maçons "libéraux" savent qu'ils oeuvrent [...]
>> en faveur du progrès humain, c'est-à-dire pour l'émancipation
>> des hommes, trop longtemps soumis au dogmatisme religieux,
>> de plus en plus hypocrite actuellement.

Euh, vous vous contredisez à quelques paragraphes de distance.

Vous dites ci-haut:

	«dans les loges a-dogmatiques [...] personne n'y estime
	détenir plus d'une parcelle de vérité, et encore : c'est
	présomptueux!»

Si personne ne détient la vérité absolue, comment pouvez-vous
savoir avec une telle certitude absolue que vous «oeuvrez en
faveur du progrès humain»?

Ne devriez-vous pas plutôt dire quelque chose comme:

	Peut-être, parfois, certains Francs-maçons oeuvrent au
	progrès humain, mais encore là, ça pourrait changer,
	car la «vérité» est partielle, provisoire et personnelle.


>> de la spiritualité laïque (dont peu de gens soupçonnent
>> actuellement l'existence!),

Primo, le sens premier du mot «laïc», c'est quelqu'un
comme moi qui croit tout ce que la sainte Église catholique
croit et enseigne, mais qui n'est ni prêtre ni religieux.

Dans le sens où vous l'employez, le mot «laïc» est un euphémisme
pour «athée».

Secundo, «spiritualité laïque» porte à confusion. Si Dieu
n'existe pas, nous sommes des êtres purement matériels. Nous
n'avons pas d'âme spirituelle et immortelle créée immédiatement
par Dieu au moment de la conception. Une «spiritualité», par
définition, c'est quelque chose qui nourrit ou guérit notre esprit.

Pas de Dieu, pas d'esprit. Pas d'esprit, pas de spiritualité.

Une «spiritualité athée» est une contradiction dans les
termes.

Il serait préférable d'employer une expression moins métaphorique
et plus correcte comme une «philosophie athée», ou une «morale
athée», etc.


>> je reste toujours ouvert à un échange
>> ponctuel.

Bien!


>> Je souhaiterais savoir si les lecteurs du lien que vous
>> avez mentionné liront ou non ma réponse.

Tous nos courriels sont affichés sur mon site web. Les
gens peuvent retrouver notre échange soit par la page
des «Ajouts récents», soit par celle du «Bottin des brebis
et des loups».

Quant à savoir combien de lecteurs nous liront attentivement...

Eh bien, je dois dire que statistiquement, suite à mes observations
des faits, je constate que peu de gens lisent attentivement
(que ce soit Thonnard ou Thys!)

;-)

Au plaisir!

Stefan

5) M. Thys (2007-décembre-20)

-----Original Message-----
From: Michel THYS
Sent: 20 décembre 2007 13:10
To: Stefan Jetchick
Subject: Suite de notre échange.

Bonjour Monsieur JETCHICK,

Merci pour vos commentaires.
Puisque vous préférez commenter un texte phrase par phrase, plutôt
que globalement, je vais en faire autant, même si je "passe du coq à
l'âne" et suis "décousu" ... Je ne suis pas compétent pour formuler
une définition précise et pertinente des termes que j'utilise, mais
seulement leur sens général. Ainsi, pour moi, l'esprit critique,
c'est la capacité, la volonté, le souci, en quelque domaine que ce
soit, de pratiquer le doute systématique, de ne pas se laisser
influencer par qui que ce soit. Vous connaissez la phrase d'Henri
POINCARRE "La pensée ne doit se soumettre à aucun dogme, (...), ni à
quoi que ce soit, car, pour elle, se soumettre, ce serait cesser
d'être."

La vérité ne se "constate" pas, car cela voudrait dire que l'on s'y
soumet, sans la discuter. Selon moi, elle n'existe pas : on ne peut
que tendre vers une compréhension des phénomènes qui soit la plus
objective possible. "Ne pas être dans l'erreur" ne signifie pas qu'on
est "dans la vérité". Etre dans l'erreur, c'est porter un jugement ou
émettre une opinion sans être en possession des éléments
d'appréciation indispensables pour qu'ils soient pertinents, c'est-à-
dire aussi peu subjectifs que possible.

L' "exégèse psycho-neuro ... " ne consiste pas à ignorer un écrit,
mais à le comprendre autrement, avec de nouveaux outils, ce qui ne
veut pas dire condamner son auteur, mais éventuellement lui proposer
une critique constructive. Selon vous, si je vous comprends bien,
être "dans la vérité", c'est ne pas avoir d'opinion. Une opinion
n'est ni vraie ni probable : elle n'est que le reflet de ce que l'on
pense à un moment donné, en fonction des éléments dont on dispose.
C'est comme 'le bien" et "le mal" : comme je l'ai déjà dit, à mes
yeux, ils n'existent pas dans la nature. Ce sont des créations de
l'esprit. Mais dans le langage courant, le bien, c'est ce qui va dans
le sens du progrès humain, par exemple le respect de la dignité
humaine.

Les francs-maçons sont a priori discrets quant à leur appartenance "à
l'Ordre". Même si les persécutions des nazis sont loin, des maçons
perdent encore parfois leur emploi si le patron catholique apprend
leur "qualité". C'est pourquoi leurs actions, plus souvent
collectives qu'individuelles, sont discrètes, et leurs interventions
dans l'arène publique rarissimes, sauf en France. Il y a aussi, de
nos jours, le fait que tous ceux qui ne sont pas musulmans sont
théoriquement des mécréants, mais je le suis plus que vous ...! Nous
sommes tous à la merci d'un fanatique qui prendrait le Coran à la
lettre (cfr S. Rushdie)...

Venons-en à THONNARD. J'ai passé pas mal de temps à le lire,
notamment à propos de ses "preuves de l'existence de Dieu". Je n'y
vois que points de vue subjectifs, rationalisations a posteriori,
pétitions de principe et tautologies ... Désolé ... Selon moi, on ne
peut d'ailleurs ni prouver son existence, ni son inexistence. Par
contre, on tend de plus en plus à prouver son existence imaginaire et
donc illusoire. "Dieu est parfait" (Saint Anselme), etc ... : mais
les notions de perfection, de création, de causalité, de
déterminisme, d'ordre (apparent) etc... sont toutes
anthropomorphiques, et donc pour le moins suspectes ! La
"connaissance intuitive de Dieu" n'est pour moi que la manifestation
de l'activité du cerveau rationnel lorsqu'elle est influencée
inconsciemment par le cerveau émotionnel.

Thonnard reconnaît quand même que "l'enfant connaît l'existence de
Dieu par l'éducation", mais il va jusquà penser que "les enfants
élevés dans l'ignorance totale de Dieu" vont choisir l'égoïsme plutôt
que l'honnêteté "! Quelle ignorance de ce qu'est la morale laïque!
"Dieu existe parce que le monde existe" : encore de
l'anthropomorphisme. L'univers pourrait bien avoir toujours existé,
sous diverses formes (Lavoisier "Rien ne se crée, tout se
transforme"). On a déjà dénombré 9 big bang, paraît-il ... Il n'y a
pas d' "être infini" : seuls le temps et l'espace le sont : il y a
une infinité d'univers, comme l'avait déjà pressenti Démocrite
("Innumerabiles sunt mundi") ... Einstein, que je ne me serais pas
permis de citer s'il n'avait pas été déiste (mais antidogmatique)
ajoutait : "La bêtise humaine donne une idée de l'infini" ... Il
avait raison, sauf - cela va sans dire - dans le domaine religieux :
la foi n'a rien à voir avec l'intelligence ... Je regrette seulement
que les francs-maçons "réguliers" qui imposent "la croyance en Dieu
et en l'immortalité de l'âme" ne se soient pas affranchis de leur
éducation et de leur milieu croyants. Je regrette tout autant la
position des francs-maçons déistes qui invoquent le "Grand
Architecte de l'Univers", alias "Dieu", même si ce n'est qu'un
symbole. C'est leur bon droit, mais se sont-ils remis en question?
...

L'athée "au sens plein", ce n'est ni NIETZSCHE, ni SARTRE, mais celui
qui a pris conscience des mécanismes de défense qui soutendent la foi
en l'absence d'alternatives laïques non aliénantes. On ne peut
évidemment pas reprocher à Thonnard d'avoir ignoré des observations
scientifiques postérieures à son décès, mais par contre, il aurait pu
lire (je pense me souvenir qu'il est mort après 1966) "Psychologie
religieuse" (1966) du R.P. Antoine VERGOTE, ancien professeur à
l'Université catholique de Louvain : c'est à lui que je dois d'être
passé de la croyance (en 1961) à l'athéisme (en 1966) , après être
passé par les étapes intermédiaires : déisme, agnosticisme,
incroyance).

Je voudrais enfin aborder la question de la spiritualité. L' "âme"
n'a évidemment aucune réalité objectivable. C'est un héritage des
siècles passés ... Il n'y a de contradiction dans "spiritualité
athée" (il faudrait dire laïque ou humaniste) que si l'on n'en a
aucune idée ... Je vous copie donc ci-dessous l'extrait qui concerne
la spiritualité laïque qui figure dans mon dialogue avec André
TARASSI : "Quoi que vous en pensiez, écrivais-je, nous sommes du même
avis : "Les valeurs humanistes, écrivait Tarassi, pour être
authentiques et véritablement vécues, ne peuvent pas être que des
concepts, ou des principes intellectuels, mais des réalités vivantes
dans le coeur des hommes". L'expérience intime, de l'ordre du
sentiment, "existe aussi bien dans le cas de la spiritualité
religieuse que laïque. L'humanisme et la fraternité aussi, simplement
parce qu'avant d'être croyants ou incroyants, nous avons en commun
d'être des humains.

Pour être passé jadis de l'une à l'autre, je pense que si quitter la
croyance pour l'incroyance procède largement d'une «décision
intellectuelle», cela implique également, aussi paradoxal que cela
puisse vous paraître, une sorte de consentement affectif préalable,
de l'ordre du sentiment, une sorte de conviction en somme, qui
témoigne d'une spiritualité cette fois laïque, non plus
transcendantale mais immanente, simplement humaine. Les
rationalisations interviennent après, et renforcent cette conviction.

Dans votre «ajout», vous écrivez que "l'humanisme ou la fraternité
ne peuvent naître que d'une expérience intime, de l'ordre du
sentiment".l'humanisme ou la fraternité ne peuvent naître que d'une
expérience intime, de l'ordre du sentiment». Mais c'est vrai aussi
bien s'il s'agit d'une expérience religieuse que laïque. L'humanisme,
la spiritualité, la fraternité ne sont évidemment pas l'apanage des
religions, anciennes ou récentes. Les laïques, et en particulier les
francs-maçons, les vivent tout aussi intensément, mais différemment.
Face à la disparition croissante des certitudes, et aux incertitudes
économiques, nous sommes tous en quête de sens. Dès que nous sommes
en présence d'une circonstance qui nous dépasse ou dans un épisode
heureux ou douloureux de l'existence, nous devenons sensibles à une
forme ou l'autre de spiritualité, avec ou sans connotation
religieuse. Ainsi, Eric-Emmanuel SCHMITT, en état de faiblesse sous
la voûte étoilée et glaciale du Sahara, a ressenti un bouleversement
affectif et a retrouvé la foi. Mais la dimension spirituelle se
découvre tout aussi bien par la méditation zen, le bouddhisme, la
musique de Mozart, un orgasme simultané, une odeur d'encens, etc ...
Par contre, sans redevenir croyant pour autant, André COMTE-
SPONVILLE, marchant la nuit en silence dans la forêt, a ressenti «
une grande paix, la suspension ou l'abolition du temps, et du
discours, une simplicité merveilleuse et pleine, comme si tout
l'univers était là, présent, sans mystère ni question, (..), une
béatitude, un premier instant de plénitude, ...».

Mais il y a aussi une spiritualité laïque active, celle qui consiste
à se sentir sur une même longueur d'onde que celle des hommes et des
femmes animés par un idéal commun de perfectionnement individuel et
collectif, par le respect des mêmes principes et des mêmes valeurs,
etc ... Ce qui est «sacré», dans le sens d'inviolable, pour un
laïque, c'est d'abord le respect de la dignité de l'homme, de la
femme et de l'enfant, et le respect de leurs droits et libertés, ce
qui implique la condamnation sans appel de pratiques telles que
l'excision, pour ne citer que cet exemple.

Il existe enfin, pour certains laïques, «probes et libres», cooptés
pour leurs qualités de coeur et d'esprit, mais aussi, à qualités
humaines égales, pour certains croyants ayant sincèrement remis en
question leurs certitudes, une spiritualité maçonnique. Mais la voie
initiatique qu'ils suivent, la méthode de travail symbolique et les
rituels (volontaires, motivés et non subis) qu'ils pratiquent, n'ont
un sens que s'ils sont vécus. Ils sont incommunicables autrement que
par l' «Initiation» et l'assiduité en loge. Les symboles de la
franc-maçonnerie ne sont pas statiques comme les symboles profanes et
religieux : ils sont librement interprétables par chacun. La
spiritualité maçonnique n'est pas verticale mais horizontale :
s'inspirant de la maïeutique, elle procède d'une quête de sens de
soi-même, au contact des autres. La franc-maçonnerie a-dogmatique est
une école de liberté, de dignité et de sagesse. Elle s'investit dans
la compréhension de tout ce qui est humain, indépendamment de tout
absolu, (mais le «grand architecte de l'univers, alias Dieu», peut
être perçu comme un symbole, non pas dans le sens déterministe de «
forces» qui orienteraient l'évolution dans le sens d'un «progrès»,
mais dans celui de l'expression des lois bio-physico-chimiques qui,
plus vraisemblablement, par complexifications successives, adaptent
lentement le vivant au milieu, par essais et erreurs successifs et
aléatoires. Mais revenons à ce dont nous «parlions» : la
spiritualité maçonnique, c'est finalement l'harmonisation de
l'individu par lui-même, le cheminement qui consiste à construire à
la fois, par le dialogue, la tolérance et le respect mutuels, son
temple intérieur et son temple extérieur. Il en résulte le sentiment
exaltant de faire partie d'une chaîne d'union fraternelle qui relie
tous les maçons de l'univers.


Je dois vous préciser que trop d'activités et interventions vont à
présent monopoliser mon temps. Je ne pourrai donc pas poursuivre cet
échange avant un temps certain. Je suis déjà très heureux qu'il ait
pu avoir lieu, même si nous savions dès l'abord que nous allions nous
heurter à l'inévitable pierre d'achoppement entre croyants et
incroyants.

Au plaisir!

Michel THYS

6) S. Jetchick (2007-décembre-21)

>> -----Original Message-----
>> From: Stefan Jetchick
>> Sent: 21 décembre 2007 13:00
>> To: Michel THYS
>> Subject: RE: Suite de notre échange.

Bonjour M. Thys,


>> Puisque vous préférez commenter un texte phrase par phrase, plutôt
>> que globalement

C'est plutôt que j'aime: (i) lire soigneusement, (ii) éprouver toutes
les affirmations d'un auteur, (iii) répondre à toutes les questions
d'un correspondant, (iv) éviter que mes courriels déclenchent mon propre
détecteur! ;-)

Lorsque j'ai des commentaires «globaux», je les place au début ou à
la fin.


>> l'esprit critique, c'est la capacité, la volonté, le souci,
>> en quelque domaine que ce soit, de pratiquer le doute
>> systématique

Nous semblons en parfait accord au moins sur ce point. Voir
le premier doigt du Gant du philosophe.


>> Vous connaissez la phrase d'Henri
>> POINCARRE "La pensée ne doit se soumettre à aucun dogme, (...), ni à
>> quoi que ce soit, car, pour elle, se soumettre, ce serait cesser
>> d'être."

Primo, il est de loin préférable de citer l'oeuvre et la page
d'un auteur, surtout si on se prépare à appuyer un argument très
important sur cette citation. Un hyperlien vers la citation en tant
que telle devient de plus en plus la norme en notre ère de
l'Information.

Secundo, son nom s'écrit «Henri Poincaré». Comme vous n'avez pas
donné de référence, j'ai cherché sur l'Internet, mais au début je
ne trouvais rien, à cause de votre faute dans son nom.

Tertio, j'ai cherché «Henri Poincaré pensée dogme aucun soumettre»
dans Google, et trouvé ceci:

	«La pensée ne doit jamais se soumettre, ni à un dogme, ni à un
	parti, ni à une passion, ni à un intérêt, ni à une idée
	préconçue, ni à quoi que ce soit, si ce n'est aux faits
	eux-mêmes, parce que, pour elle, se soumettre, ce serait
	cesser d'être.»
	[ici, ici, ici, etc.]

Votre citation omet la partie la plus importante! Poincaré dit que,
dans un seul cas très important, la pensée DOIT SE SOUMETTRE!

Votre citation sans référence, incorrecte et biaisée frise la
malhonnêteté intellectuelle. Si j'étais sur un jury de thèse à
l'université, et que je trouvais une telle horreur, je refuserais
d'accorder le diplôme à cet étudiant.

Mettons qu'on va laisser passer, en invoquant une distraction de
votre part.


>> La vérité ne se "constate" pas, car cela voudrait dire que l'on s'y
>> soumet, sans la discuter.

Pitié, M. Thys, mettez votre main droite devant votre nez, et
répondez à ma question: «Combien de doigts votre main a-t-elle?»

Comptez. Soumettez votre pensée «aux faits eux-mêmes», comme le
dit si bien Henri Poincaré. Comptez une deuxième fois pour être
bien sûr. Puis dites à haute voix: «Ma main droite a ___ doigts».
Voilà. Vous avez proféré une vérité, suite à une constatation
des faits.


>> Selon moi, [la vérité] n'existe pas

OK, vous êtes un patient récalcitrant.

Dans ce cas, giflez-vous vous même cinq
fois, en comptant tout haut pour ne pas en manquer: VLAN! Une! RE-VLAN!
Deux! ET BAFFE! Trois! POW! Quatre! CLAQUE! Cinq!

Maintenant, dites à haute voix: «Je viens tout juste de me gifler
sauvagement cinq fois». Voilà. Vous avez proféré une vérité,
suite à une constatation des faits.


>> L' "exégèse psycho-neuro ... " ne consiste pas à ignorer un écrit,
>> mais à le comprendre autrement

Vous n'avez pas compris ma critique.

Vous avez affirmé:

	«A fortiori lorsqu'il s'agit de lectures unilatérales,
	comme celles de THONNARD : il part en effet d'un pré-supposé,
	l'existence de Dieu, ce qui hypothèque ipso facto tout le contenu de
	son discours ... Je n'ai donc nulle envie de discuter inutilement
	ses positions.»

Vous proférez à cet endroit, comme je vous l'ai dit, un mensonge. Thonnard
ne présuppose pas l'existence de Dieu. Même si ses preuves étaient
complètement pourries, reste qu'il commence par poser la question de
l'existence de Dieu, pour ensuite la résoudre (du mieux qu'il peut),
pour ensuite seulement fonder sa morale sur sa théodicée.


>> Selon vous, si je vous comprends bien,
>> être "dans la vérité", c'est ne pas avoir d'opinion.

Non. Vous ne me comprenez pas bien.

Comment se fait-il que je passe mon temps à vous citer textuellement
et précisément, mais que vous ne citez jamais mes textes? Votre
«distraction Poincaré» est-elle en fait le symptôme d'une maladie
méthodologique plus grave?


>> Une opinion n'est ni vraie ni probable

Pitié, Michel, donne-toi une deuxième dose!


>> C'est comme "le bien" et "le mal": comme je l'ai déjà dit, à mes
>> yeux, ils n'existent pas dans la nature.

Commence par constater avec certitude cinq bonnes baffes. Ensuite
on passera à quelque chose de plus subtile à constater.


>> des maçons
>> perdent encore parfois leur emploi si le patron catholique apprend
>> leur "qualité".

Disons que si j'étais un Directeur d'école pour enfants, et que
je m'aperçevais qu'un de mes professeurs n'était pas capable de
compter jusqu'à cinq, j'aurais des doutes quant à sa «qualité»,
qu'il soit briqueteur ou maçon.


>> Il y a aussi, de
>> nos jours, le fait que tous ceux qui ne sont pas musulmans sont
>> théoriquement des mécréants, mais je le suis plus que vous ...!

Ah oui? Avez-vous dit publiquement que «Dieu ne s'appelle pas Allah,
et Mahomet n'est pas son prophète»? Où? (J'espère que vous
êtes au moins capable de vous citer vous-même avec des références
correctes!)


>> Venons-en à THONNARD. J'ai passé pas mal de temps à le lire,
>> notamment à propos de ses "preuves de l'existence de Dieu". Je n'y
>> vois que points de vue subjectifs, rationalisations a posteriori,
>> pétitions de principe et tautologies ...

OK. Pourquoi pas? Thonnard n'est pas Dieu, il peut se tromper.
Mais alors il faut le montrer à nos lecteurs. Par exemple,
faire un tableau à deux colonnes. Dans la colonne de gauche,
énumérer les définitions de: «points de vue subjectifs,
rationalisations a posteriori, pétitions de principe et tautologies».
Ensuite, dans la colonne de droite, citer les endroits où
Thonnard se rend coupable de telles erreurs (facile, ses livres
sont sur l'Internet, alors vous pouvez faire Copier-Coller, et
même fournir l'hyperlien!).


>> Désolé ...

Euhhhhhh, comment «Désolé»?

Où est votre tableau à deux colonnes?

Sinon, où sont vos excuses pour avoir calomnié?


>> Selon moi, on ne
>> peut d'ailleurs ni prouver son existence, ni son inexistence.

Bon, oublions vos citations créatives, vos mensonges, vos
calomnies. Remettons le compteur à zéro, et faisons semblant
que nous venons de commencer le débat.

Vous affirmez que: «on ne peut d'ailleurs ni prouver son existence
[de Dieu], ni son inexistence».

Comme vous le savez, en tant que philosophe, je n'ai pas le
droit de soumettre ma pensée «ni à un dogme, ni à un parti, ni à
une passion, ni à un intérêt, ni à une idée préconçue, ni à quoi que ce
soit, si ce n'est aux faits eux-mêmes».

Donc je dois avoir «la capacité, la volonté, le souci, en
quelque domaine que ce soit, de pratiquer le doute systématique».
Je ne peux donc pas accepter votre affirmation comme ça, bêtement,
sans d'abord l'éprouver.

La première étape pour éprouver l'affirmation d'un auteur, c'est
de fouiller soigneusement, pour essayer de trouver les arguments
que cet auteur présente pour étayer son affirmation.

Je commence donc à fouiller.


>> Par contre, on tend de plus en plus à prouver son existence
>> imaginaire et donc illusoire.

Disons que si moi j'avais affirmé que «on tend à prouver que
Dieu existe», vous auriez bien ri de mon «On»!

Pas encore de preuve. Je continue de fouiller.


>> les notions de perfection, de création, de causalité, de
>> déterminisme, d'ordre (apparent) etc... sont toutes
>> anthropomorphiques, et donc pour le moins suspectes !

Bon, enfin! Un argument pour appuyer votre affirmation! Votre
argument semble bien être:

	Tout ce qui existe dans l'homme ne peut pas exister ailleurs.

	Or, les notions de perfection, de causalité, etc.,
	existent dans l'homme.

	Donc les notions de perfection, de causalité, etc.,
	ne peuvent pas nous donner d'informations sur l'existence
	ou l'inexistence d'un «Dieu».

Disons que toute la force de cet argument dépend de la force
de la majeure (le premier des trois mottons du bidule ci-haut,
appelé «syllogisme»).


>> La "connaissance intuitive de Dieu"

Recherche Google sur ces mots dans Thonnard.

Thonnard nie qu'on puisse avoir de Dieu une connaissance intuitive
(«Il en serait autrement si nous avions de Dieu une connaissance
intuitive» [§806, (2)]).

Si on cherche «intuitive» dans tout le chapitre sur la Théodicée,
on relève plusieurs endroits où Thonnard parle d'intuition. Sauf
que Thonnard ne dit pas qu'on a de Dieu une connaissance intuitive.

Premier exemple d'apparition du mot «intuitive»:

	«Mais tous ces chemins n'en font qu'un, ils se rejoignent en une preuve
	synthétique où nous retrouverons la part de vérité des doctrines
	philosophiques qui pensent avoir de Dieu une connaissance intuitive.»
	[§959]

Si Thonnard pensait que ces doctrines étaient vraies, il le dirait.
Il sous-entend au contraire que ces doctrines sont fausses en
général, tout en ayant une part de vrai. Par exemple, vous mentionnez
la célèbre preuve de saint Anselme. Qu'en pense Thonnard? Allons
ensemble soumettre notre pensée aux faits eux-mêmes!

	«saint Thomas [et par conséquent Thonnard, rejettent tous deux
	cette «preuve»] comme passant indûment de l'ordre logique à
	l'ordre réel»
	[§223]


Deuxième exemple d'apparition du mot «intuitive»:

	«La preuve se présente sous deux formes; l'une plus populaire et intuitive;
	l'autre plus scientifique.»
	[§964]

Primo, Thonnard prétend que la même preuve a deux formes, et que une
de ses formes n'est pas intuitive! Secundo, Thonnard dit
quelques phrases plus loin: «Cette première forme [...] manque de rigueur»!

Et ainsi de suite pour les autres apparitions du mot «intuitive».


Ce qui vous confond peut-être, c'est une méconnaissance de la
Logique et de l'intuition. Nous avons deux grandes façons de
connaître: intuitivement (ou directement), et par raisonnement
(ou indirectement). Nous n'avons que trois types d'intuition
(dont aucune nous permet d'atteindre Dieu). Une «preuve», c'est
une connexion solide entre une affirmation non-évidente, et une
constatation intuitive. Une preuve ne peut pas «remonter à l'infini»,
éventuellement elle doit se fonder sur des constatations évidentes,
un peu comme un gratte-ciel doit éventuellement être appuyé sur
une fondation.

À cause de la nature même d'une preuve, il faudra toujours
avoir une composante intuitive, que ce soit une preuve mathématique,
ou une preuve biologique, ou une preuve métaphysique.


>> Thonnard va jusquà penser que "les enfants élevés dans
>> l'ignorance totale de Dieu" vont choisir l'égoïsme plutôt
>> que l'honnêteté"!

Absolument faux. Citation exacte:

	«Mais s'il s'agit d'enfants élevés dans l'ignorance totale de
	Dieu ou même l'hostilité contre lui, comme dans un milieu athée
	communiste, le moment vient aussi de poser son acte libre en
	choisissant entre l'honnêteté et l'égoïsme, entre ce qu'on lui a
	appris à considérer comme un bien digne de l'homme, - et ce qui
	se présente comme satisfaction personnelle, opposée à ce devoir.
	S'il fait un bon choix, il se porte par le dynamisme foncier de
	son vouloir, vers le Bien absolu qui existe, et l'on peut dire
	qu'il connaît Dieu implicitement, d'une connaissance practico-
	pratique, même en le niant explicitement d'une connaissance
	théorique.»
	[§971]

Une fois de plus, vous mentez. Thonnard dit qu'un enfant élevé
dans l'ignorance totale de Dieu peut connaître Dieu implicitement!

À partir d'ici, je cesse de lire votre courriel. Je considère
avoir suffisamment établi votre manque de crédibilité. Je
ne dis pas que vous allez être d'accord avec mon verdict, mais
au moins les lecteurs de mon site web pourront constater par
eux-mêmes les faits, en lisant notre échange.

Que Dieu vous bénisse,

Stefan

7) M. Thys (2007-décembre-22)

-----Original Message-----
From: Michel THYS
Sent: 22 décembre 2007 09:43
To: Stefan Jetchick
Subject: Suite (et fin) de notre "dialogue" ...

Bonjour Monsieur JETCHICK,

Je m'attendais à ce que vous me reprochiez de ne pas avoir cité la
phrase complète d'Henri POINCARE. Mes modestes connaissances
informatiques ne me permettent pas d'interrompre un e-mail sans le
perdre pour aller vérifier une source. Par contre, c'est par
paresse que je n'ai pas vérifié l'orthographe du nom, ce qui vous a
obligé à faire quelques recherches. Sorry ! Mais de là à y voir de
la malhonnêteté intellectuelle ...! Evidemment qu'il faut se
soumettre aux faits. Mais jamais à quoi que ce soit d'autre ni à
qui que ce soit, surtout s'il tente d'imposer ses vues.

Personnellement, je ne me permettrais pas de demander à qui que ce
soit de "compter sur ses doigts" : ce serait le considérer comme un
débile mental, et donc irrespectueux. Votre "tableau à deux
colonnes" est de la même veine. Je préfère pour ma part les
échanges courtois d'idées, qui ne risquent pas de dériver vers des
arguments "ad hominem", du genre "vous mentez", vous proférez des
"calomnies", ce qui signifie que je serais intentionnellement de
mauvaise foi. C'est dificilement acceptable, vous en conviendrez.
De tels arguments m'obligent en outre à y répondre sur un ton qui
n'est pas le mien, ce qui ne peut durer. Mais passons, comme vous
dites, puisque c'est, semble-t-il, votre méthode didactique et que
vous tenez à "être crédible", à convainvre vos lecteurs du bien-
fondé de vos thèses et à avoir raison à leurs yeux. Je ne cherche
pas, moi, à être crédible, mais seulement à permettre aux lecteurs
de se forger leur propre opinion. Mais cela suppose qu'on ne lui
préfère pas une "vérité" révélée et indiscutable. Telle est en
effet l'éternelle et inévitable "pierre d'achoppement" entre un
incroyant et un croyant.

Je ne pense pas avoir écrit "Dieu ne s'appelle pas Allah et Mahomet
n'est pas son prophète", et ce n'est évidemment pas à moi de me
souvenir de ce que je n'ai pas écrit, mais à vous à m'en fournir la
preuve, auquel cas je m'inclinerai.

Si je ne puis pas vous suivre dans votre méthode de "tableau à deux
colonnes", c'est parce que vous n'imaginez pas que je vais (exemple
extrème) me mettre à commenter verset par verset tous les textes
"sacrés" et "révélés", alors que ce sont des oeuvres humaines,
apocryphes et manipulées depuis toujours, et que leur non-
historicité, comme celle de Jésus, est devenue évidente,
ojectivement parlant. Il faut être croyant pour croire le
contraire, et pour cause.

Lorsque j'écris "On tend deplus en plus à prouver l'existence
imaginaire" de Dieu, j'entends par "on" les psychoneurophysiogistes
(certains par l'absurde) dont je n'allais pas ici vous détailler
les observations.

Selon moi, les notions de perfection, de causalité, etc,,,, ne pré-
existent pas "dans l'homme" : elles sont le fruit de son
imagination, comme la notion de Dieu. Elles n'existent d'ailleurs
pas dans le cerveau des autres primates, dont la néocortex ne
permet pas cette aptitude. Et penser, comme certains, que ce serait
Dieu qui nous l'aurait donnée, ce serait encore de
l'anthtopomorphisme. On tourne en rond ! La "connaissance
intuitive" de Dieu est le résultat de l'éducation religieuse et
d'un milieu culturel unilatéral. Elle n'apparaît jamais chez un
enfant à qui l'on n'a pas parlé de Dieu, sauf influences
ultérieures incontrôlées ... Faire "le bon choix, vers le Bien
absolu qui existe" ne signifie pas qu'on connaît Dieu
implicitement. L'athée a une moralequi n'implique nullement une
"connaissance implicite de Dieu". Le "bon sens", loin de "déployer
les richesses transcentantes de l'être", l'inciterait plutôt à se
méfier de ce qui n'est pas réel et vérifiable concrètement. Sans
doute, à la base d'une expérience scientifique, y a-t-il toujours
une hypothèse de travail qui devra être confirmée ou infirmée.
C'est sans une doute une forme d'intuition.

Une preuve n'est fournie que par le résultat répété d'une
expérience, fût-elle sociologique. Exemple : l'éducation religieuse
unilatérale rend l'enfant croyant, à 100 % chez les musulmans. La
corrélation est parfaite. Dans les autres religions, je constate
qu'une apostasie est possible, mais improbable voire impossible
après l'âge de 25 ans environ. Les considérations de Saint THOMAS
sont obsolètes, totalement dépassées par les sciences cognitives
actuelles. Je ne parviens donc plus à les lire, malgré leur intérêt
historique. J'ai mieux à faire, hic et nunc.

Je suis néanmoins heureux d'avoir pu, par vos textes et vos
commentaires, dont je vous remercie, mieux comprendre le phénomène
religieux, et en particulier les réticences des croyants à évoluer
dans leurs conceptions. Vous me direz que je n'évolue plus, moi non
plus. A cette différence quand même que j'ai évolué entre 21 et 25
ans, ayant bénéficié à temps d'informations sur les conceptions
laïques qu'on m'avait volontairement cachées jusque là. Je n'en
veux plus aux pasteurs protestants de 1952 à 1958 que j'ai connus,
mais j'estime avoir une "dette morale", par "solidarité
philosophique", lorsque j'écris un texte, vis-à-vis de ceux et
celles qui cherchent à s'affranchir d'une foi qui leur fait plus de
tort que de bien.

Sincèrement,
Michel THYS
Waterloo.

 


Désistement standard de fin de débat («Pourquoi n'as-tu pas toujours le dernier mot dans les débats par courriel?»)

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