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Catéchisme de l'Église catholique -- §300 à §399

Dieu transcende la création et lui est présent

§300
Dieu est infiniment plus grand que toutes ses oeuvres (cf. Si 43, 28): «Sa majesté est plus haute que les cieux» (Ps 8, 2), «à sa grandeur point de mesure» (Ps 145, 3). Mais parce qu'Il est le Créateur souverain et libre, cause première de tout ce qui existe, Il est présent au plus intime de ses créatures: «En Lui nous avons la vie, le mouvement et l'être» (Ac 17, 28). Selon les paroles de S. Augustin, Il est «plus haut que le plus haut de moi, plus intime que le plus intime» (Conf. 3, 6, 11).

Dieu maintient et porte la création

§301
Avec la création, Dieu n'abandonne pas sa créature à elle-même. Il ne lui donne pas seulement d'être et d'exister, il la maintient à chaque instant dans l'être, lui donne d'agir et la porte à son terme. Reconnaître cette dépendance complète par rapport au Créateur est une source de sagesse et de liberté, de joie et de confiance:

Oui, tu aimes tout ce qui existe, et tu n'as de dégoût pour rien de ce que tu as fait; car si tu avais haï quelque chose, tu ne l'aurais pas formé. Et comment une chose aurait-elle subsisté, si tu ne l'avais voulue? Ou comment ce que tu n'aurais pas appelé aurait-il été conservé? Mais tu épargnes tout, parce que tout est à toi, Maître ami de la vie (Sg 11, 24-26).

V. Dieu réalise son dessein: la divine providence

§302
La création a sa bonté et sa perfection propres, mais elle n'est pas sortie tout achevée des mains du Créateur. Elle est créée dans un état de cheminement («in statu viae») vers une perfection ultime encore à atteindre, à laquelle Dieu l'a destinée. Nous appelons divine providence les dispositions par lesquelles Dieu conduit sa création vers cette perfection:

Dieu garde et gouverne par sa providence tout ce qu'Il a créé, «atteignant avec force d'une extrémité à l'autre et disposant tout avec douceur» (Sg 8, 1). Car «toutes choses sont à nu et à découvert devant ses yeux» (He 4, 13), même celles que l'action libre des créatures produira (Cc. Vatican I: DS 3003).

§303
Le témoignage de l'Écriture est unanime: la sollicitude de la divine providence est concrète et immédiate, elle prend soin de tout, des moindres petites choses jusqu'aux grands événements du monde et de l'histoire. Avec force, les livres saints affirment la souveraineté absolue de Dieu dans le cours des événements: «Notre Dieu, au ciel et sur la terre, tout ce qui lui plaît, Il le fait» (Ps 115, 3); et du Christ il est dit: «S'Il ouvre, nul ne fermera, et s'Il ferme, nul n'ouvrira» (Ap 3, 7); «Il y a beaucoup de pensées dans le coeur de l'homme, seul le dessein de Dieu se réalisera» (Pr 19, 21).

§304
Ainsi voit-on l'Esprit Saint, auteur principal de l'Écriture Sainte, attribuer souvent des actions à Dieu, sans mentionner des causes secondes. Ce n'est pas là «une façon de parler» primitive, mais une manière profonde de rappeler la primauté de Dieu et sa Seigneurie absolue sur l'histoire et le monde (cf. Is 10, 5-15; 45, 5-7; Dt 32, 39; Si 11, 14) et d'éduquer ainsi à la confiance en Lui. La prière des Psaumes est la grande école de cette confiance (cf. Ps 22; 32; 35; 103; 138; e.a.).

§305
Jésus demande un abandon filial à la providence du Père céleste qui prend soin des moindres besoins de sens enfants: «Ne vous inquiétez donc pas en disant: qu'allons-nous manger? qu'allons-nous boire? (...) Votre Père céleste sait que vous avez besoin de tout cela. Cherchez d'abord son Royaume et sa justice, et tout cela vous sera donné par surcroît» (Mt 6, 31-33; cf. 10, 29-31).

La providence et les causes secondes

§306
Dieu est le Maître souverain de son dessein. Mais pour sa réalisation, Il se sert aussi du concours des créatures. Ceci n'est pas un signe de faiblesse, mais de la grandeur et de la bonté du Dieu Tout-puissant. Car Dieu ne donne pas seulement à ses créatures d'exister, il leur donne aussi la dignité d'agir elles-mêmes, d'être causes et principes les unes des autres et de coopérer ainsi à l'accomplissement de son dessein.

§307
Aux hommes, Dieu accorde même de pouvoir participer librement à sa providence en leur confiant la responsabilité de «soumettre» la terre et de la dominer (cf. Gn 1, 26-28). Dieu donne ainsi aux hommes d'être causes intelligentes et libres pour compléter l'oeuvre de la Création, en parfaire l'harmonie pour leur bien et celui de leur prochains. Coopérateurs souvent inconscients de la volonté divine, les hommes peuvent entrer délibérément dans le plan divin, par leurs actions, par leurs prières, mais aussi par leurs souffrances (cf. Col 1, 24). Ils deviennent alors pleinement «collaborateurs de Dieu» (1 Co 3, 9; 1 Th 3, 2) et de son Royaume (cf. Col 4, 11).

§308
C'est une vérité inséparable de la foi en Dieu le Créateur: Dieu agit en tout agir de ses créatures. Il est la cause première qui opère dans et par les causes secondes: «Car c'est Dieu qui opère en nous à la fois le vouloir et l'opération même, au profit de ses bienveillants desseins» (Ph 2, 13; cf. 1 Co 12, 6). Loin de diminuer la dignité de la créature, cette vérité la rehausse. Tirée du néant par la puissance, la sagesse et la bonté de Dieu, elle ne peut rien si elle est coupée de son origine, car «la créature sans le Créateur s'évanouit» (GS 36, § 3); encore moins peut-elle atteindre sa fin ultime sans l'aide de la grâce (cf. Mt 19, 26; Jn 15, 5; Ph 4, 13).

La providence et le scandale du mal

§309
Si Dieu le Père Tout-puissant, Créateur du monde ordonné et bon, prend soin de toutes ses créatures, pourquoi le mal existe-t-il? À cette question aussi pressante qu'inévitable, aussi douloureuse que mystérieuse, aucune réponse rapide ne saura suffire. C'est l'ensemble de la foi chrétienne qui constitue la réponse à cette question: la bonté de la création, le drame du péché, l'amour patient de Dieu qui vient au devant de l'homme par ses alliances, par l'Incarnation rédemptrice de son Fils, par le don de l'Esprit, par le rassemblement de l'Église, par la force des sacrements, par l'appel à une vie bienheureuse à laquelle les créatures libres sont invitées d'avance à consentir, mais à laquelle elles peuvent aussi d'avance, par un mystère terrible, se dérober. Il n'y a pas un trait du message chrétien qui ne soit pour une part une réponse à la question du mal.

§310
Mais pourquoi Dieu n'a-t-il pas créé un monde aussi parfait qu'aucun mal ne puisse y exister? Selon sa puissance infinie, Dieu pourrait toujours créer quelque chose de meilleur (cf. S. Thomas d'A., s. th. 1, 25, 6). Cependant dans sa sagesse et sa bonté infinies, Dieu a voulu librement créer un monde «en état de voie» vers sa perfection ultime. Ce devenir comporte, dans le dessein de Dieu, avec l'apparition de certains êtres, la disparition d'autres, avec le plus parfait aussi le moins parfait, avec les constructions de la nature aussi les destructions. Avec le bien physique existe donc aussi le mal physique, aussi longtemps que la création n'a pas atteint sa perfection (cf. S. Thomas d'A., s. gent. 3, 71).

§311
Les anges et les hommes, créatures intelligentes et libres, doivent cheminer vers leur destinée ultime par choix libre et amour de préférence. Ils peuvent donc se dévoyer. En fait, ils ont péché. C'est ainsi que le mal moral est entré dans le monde, sans commune mesure plus grave que le mal physique. Dieu n'est en aucune façon, ni directement ni indirectement, la cause du mal moral (cf. S. Augustin, lib. 1, 1, 1: PL 32, 1221-1223; S. Thomas d'A., s. th. 1-2, 79, 1). Il le permet cependant, respectant la liberté de sa créature, et, mystérieusement, il sait en tirer le bien:

Car le Dieu Tout-puissant (...), puisqu'il est souverainement bon, ne laisserait jamais un mal quelconque exister dans ses oeuvres s'il n'était assez puissant et bon pour faire sortir le bien du mal lui-même (S. Augustin, enchir. 11, 3).

§312
Ainsi, avec le temps, on peut découvrir que Dieu, dans sa providence toute-puissante, peut tirer un bien des conséquences d'un mal, même moral, causé par ses créatures: «Ce n'est pas vous, dit Joseph à ses frères, qui m'avez envoyé ici, c'est Dieu; (...) le mal que vous aviez dessein de me faire, le dessein de Dieu l'a tourné en bien afin de (...) sauver la vie d'un peuple nombreux» (Gn 45, 8; 50, 20; cf. Tb 2, 12-18 vulg.). Du mal moral le plus grand qui ait jamais été commis, le rejet et le meurtre du Fils de Dieu, causé par les péchés de tous les hommes, Dieu, par la surabondance de sa grâce (cf. Rm 5, 20), a tiré le plus grand des biens: la glorification du Christ et notre Rédemption. Le mal n'en devient pas pour autant un bien.

§313
«Tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu» (Rm 8, 28). Le témoignage des saints ne cesse de confirmer cette vérité:

Ainsi, S. Catherine de Sienne dit à «ceux qui se scandalisent et se révoltent de ce qui leur arrive «: «Tout procède de l'amour, tout est ordonné au salut de l'homme, Dieu ne fait rien que dans ce but» (dial. 4, 138).

Et S. Thomas More, peu avant son martyre, console sa fille: «Rien ne peut arriver que Dieu ne l'ait voulu. Or, tout ce qu'il veut, si mauvais que cela puisse nous paraître, est cependant ce qu'il y a de meilleur pour nous» (Margarita Roper, Epistula ad Aliciam Alington (mense augusti 1534).

Et Lady Julian of Norwich: «J'appris donc, par la grâce de Dieu, qu'il fallait m'en tenir fermement à la foi, et croire avec non moins de fermeté que toutes choses seront bonnes... Et tu verras que toutes choses seront bonnes». «Thou shalt see thyself that all MANNER of thing shall be well» (rev. 13, 32).

§314
Nous croyons fermement que Dieu est le Maître du monde et de l'histoire. Mais les chemins de sa providence nous sont souvent inconnus. Ce n'est qu'au terme, lorsque prendra fin notre connaissance partielle, lorsque nous verrons Dieu «face à face» (1 Co 13, 12), que les voies nous seront pleinement connues, par lesquelles, même à travers les drames du mal et du péché, Dieu aura conduit sa création jusqu'au repos de ce Sabbat (cf. Gn 2, 2) définitif, en vue duquel Il a créé le ciel et la terre.

EN BREF

§315
Dans la création du monde et de l'homme, Dieu a posé le premier et universel témoignage de son amour tout-puissant et de sa sagesse, la première annonce de son «dessein bienveillant» qui trouve sa fin dans la nouvelle création dans le Christ.

§316
Bien que l'oeuvre de la création soit particulièrement attribuée au Père, c'est également vérité de foi que le Père, le Fils et l'Esprit Saint sont l'unique et indivisible principe de la création.

§317
Dieu seul a créé l'univers librement, directement, sans aucune aide.

§318
Aucune créature n'a le pouvoir infini qui est nécessaire pour «créer» au sens propre du mot, c'est-à-dire de produire et de donner l'être à ce qui ne l'avait aucunement (appeler à l'existence ex nihilo) (cf. DS 3624).

§319
Dieu a créé le monde pour manifester et pour communiquer sa gloire. Que ses créatures aient part à Sa vérité, à Sa bonté et à Sa beauté, voilà la gloire pour laquelle Dieu les a créées.

§320
Dieu qui a créé l'univers le maintient dans l'existence par son Verbe, «ce Fils qui soutient l'univers par sa parole puissante» (He 1, 3) et par son Esprit Créateur qui donne la vie.

§321
La divine Providence, ce sont les dispositions par lesquelles Dieu conduit avec sagesse et amour toutes les créatures jusqu'à leur fin ultime.

§322
Le Christ nous invite à l'abandon filial à la Providence de notre Père céleste (cf. Mt 6, 26-34), et l'apôtre S. Pierre reprend: «De toute votre inquiétude, déchargez-vous sur lui, car il prend soin de vous» (1 P 5, 7; cf. Ps 55, 23).

§323
La providence divine agit aussi par l'agir des créatures. Aux hommes, Dieu donne de coopérer librement à ses desseins.

§324
La permission divine du mal physique et du mal moral est un mystère que Dieu éclaire par son Fils, Jésus-Christ, mort et ressuscité pour vaincre le mal. La foi nous donne la certitude que Dieu ne permettrait pas le mal s'il ne faisait pas sortir le bien du mal même, par des voies que nous ne connaîtrons pleinement que dans la vie éternelle.

§325
Le Symbole des apôtres professe que Dieu est «le Créateur du ciel et de la terre», et le Symbole de Nicée-Constantinople explicite: «... de l'univers visible et invisible».

§326
Dans l'Écriture Sainte, l'expression «ciel et terre» signifie: tout ce qui existe, la création toute entière. Elle indique aussi le lien, à l'intérieur de la création, qui à la fois unit et distingue ciel et terre: «La terre», c'est le monde des hommes (cf. Ps 115, 16) «Le ciel» ou «les cieux» peut désigner le firmament (cf. Ps 19, 2), mais aussi le «lieu» propre de Dieu: «notre Père aux cieux» (Mt 5, 16; cf. Ps 115, 16) et, par conséquent, aussi le «ciel» qui est la gloire eschatologique. Enfin, le mot «ciel» indique le «lieu» des créatures spirituelles -- les anges -- qui entourent Dieu.

§327
La profession de foi du quatrième Concile du Latran affirme que Dieu «a tout ensemble, dès le commencement du temps, créé de rien l'une et l'autre créature, la spirituelle et la corporelle, c'est-à-dire les anges et le monde terrestre; puis la créature humaine qui tient des deux, composée qu'elle est d'esprit et de corps» (DS 800; cf. DS 3002 et SPF 8).

I. Les Anges

L'existence des anges -- une vérité de foi

§328
L'existence des êtres spirituels, non corporels, que l'Écriture Sainte nomme habituellement anges, est une vérité de foi. Le témoignage de l'Écriture est aussi net que l'unanimité de la Tradition.

Qui sont-ils?

§329
S. Augustin dit à leur sujet: «'Ange' désigne la fonction, non pas la nature. Tu demandes comment s'appelle cette nature? -- Esprit. Tu demandes la fonction? -- Ange; d'après ce qu'il est, c'est un esprit, d'après ce qu'il fait, c'est un ange» (Psal. 103, 1, 15). De tout leur être, les anges sont serviteurs et messagers de Dieu. Parce qu'ils contemplent «constamment la face de mon Père qui est aux cieux» (Mt 18, 10), ils sont «les ouvriers de sa parole, attentifs au son de sa parole» (Ps 103, 20).

§330
En tant que créatures purement spirituelles, ils ont intelligence et volonté: ils sont des créatures personnelles (cf. Pie XII: DS 3801) et immortelles (cf. Lc 20, 36). Ils dépassent en perfection toutes les créatures visibles. L'éclat de leur gloire en témoigne (cf. Dn 10, 9-12).

Le Christ «avec tous ses anges»

§331
Le Christ est le centre du monde angélique. Ce sont ses anges à Lui: «Quand le Fils de l'homme viendra dans sa gloire avec tous ses anges ...» (Mt 25, 31). Ils sont à Lui parce que créés par et pour lui: «Car c'est en lui qu'ont été créées toutes choses, dans les cieux et sur la terre, les visibles et les invisibles: trônes, seigneuries, principautés, puissances; tout a été créé par lui et pour lui» (Col 1, 16). Ils sont à Lui plus encore parce qu'Il les a faits messagers de son dessein de salut: «Est-ce que tous ne sont pas des esprits chargés d'un ministère, envoyés en service pour ceux qui doivent hériter le salut?» (He 1, 14).

§332
Ils sont là, dès la création (cf. Jb 38, 7, où les anges sont appelés «fils de Dieu») et tout au long de l'histoire du salut, annonçant de loin ou de près ce salut et servant le dessein divin de sa réalisation: ils ferment le paradis terrestre (cf. Gn 3, 24), protègent Lot (cf. Gn 19), sauvent Agar et son enfant (cf. Gn 21, 17), arrêtent la main d'Abraham (cf. Gn 22, 11), la loi est communiquée par leur ministère (cf. Ac 7, 53), ils conduisent le Peuple de Dieu (cf. Ex 23, 20-23), ils annoncent naissances (cf. Jg 13) et vocations (cf. Jg 6, 11-24; Is 6, 6), ils assistent les prophètes (cf. 1 R 19, 5), pour ne citer que quelques exemples. Enfin, c'est l'ange Gabriel qui annonce la naissance du Précurseur et celle de Jésus lui-même (cf. Lc 1, 11. 26).

§333
De l'Incarnation à l'Ascension, la vie du Verbe incarné est entourée de l'adoration et du service des anges. Lorsque Dieu «introduit le Premier-né dans le monde, il dit: 'Que tous les anges de Dieu l'adorent'» (He 1, 6). Leur chant de louange à la naissance du Christ n'a cessé de résonner dans la louange de l'Église: «Gloire à Dieu ...» (Lc 2, 14). Ils protègent l'enfance de Jésus (cf. Mt 1, 20; 2, 13. 19), servent Jésus au désert (cf. Mc 1, 12; Mt 4, 11), le réconfortent dans l'agonie (cf. Lc 22, 43), alors qu'il aurait pu être sauvé par eux de la main des ennemis (cf. Mt 26, 53) comme jadis Israël (cf. 2 M 10, 29-30; 11, 8). Ce sont encore les anges qui «évangélisent» (Lc 2, 10) en annonçant la Bonne Nouvelle de l'Incarnation (cf. Lc 2, 8-14), et de la Résurrection (cf. Mc 16, 5-7) du Christ. Ils seront là au retour du Christ qu'ils annoncent (cf. Ac 1, 10-11), au service de son jugement (cf. Mt 13, 41; 24, 31; Lc 12, 8-9).

Les anges dans la vie de l'Église

§334
D'ici là toute la vie de l'Église bénéficie de l'aide mystérieuse et puissante des anges (cf. Ac 5, 18-20; 8, 26-29; 10, 3-8; 12, 6-11; 27, 23-25).

§335
Dans sa liturgie, l'Église se joint aux anges pour adorer le Dieu trois fois saint; elle invoque leur assistance (ainsi dans In Paradisum deducant te angeli... de la Liturgie des défunts [Oex 50], ou encore dans l'«Hymne chérubinique» de la Liturgie byzantine [(Liturgie de S. Jean Chrysostome]), elle fête plus particulièrement la mémoire de certains anges (S. Michel, S. Gabriel, S. Raphaël, les anges gardiens).

§336
Du début (de l'existence) (cf. Mt 18, 10) au trépas (cf. Lc 16, 22), la vie humaine est entourée de leur garde (cf. Ps 34, 8; 91, 10-13) et de leur intercession (cf. Jb 33, 23-24; Za 1, 12; Tb 12, 12). «Chaque fidèle a à ses côtés un ange comme protecteur et pasteur pour le conduire à la vie» (S. Basile, Eun. 3, 1: PG 29, 656B). Dès ici-bas, la vie chrétienne participe, dans la foi, à la société bienheureuse des anges et des hommes, unis en Dieu.

II. Le Monde visible

§337
C'est Dieu lui-même qui a créé le monde visible dans toute sa richesse, sa diversité et son ordre. L'Écriture présente l'oeuvre du Créateur symboliquement comme une suite de six jours «de travail» divin qui s'achèvent sur le «repos» du septième jour (Gn 1, 1 -- 2, 4). Le texte sacré enseigne, au sujet de la création, des vérités révélées par Dieu pour notre salut (cf. DV 11) qui permettent de «reconnaître la nature profonde de la création, sa valeur et sa finalité qui est la gloire de Dieu» (LG 36):

§338
Il n'existe rien qui ne doive son existence à Dieu créateur. Le monde a commencé quand il a été tiré du néant par la parole de Dieu; tous les êtres existants, toute la nature, toute l'histoire humaine s'enracinent en cet événement primordial: c'est la genèse même par laquelle le monde est constitué, et le temps commencé (cf. S. Augustin, Gen. Man. 1, 2, 4: PL 35, 175).

§339
Chaque créature possède sa bonté et sa perfection propres. Pour chacune des oeuvres des «six jours» il est dit: «Et Dieu vit que cela était bon». «C'est en vertu de la création même que toutes les choses sont établies selon leur consistance, leur vérité, leur excellence propre avec leur ordonnance et leurs lois spécifiques» (GS 36, § 2). Les différentes créatures, voulues en leur être propre, reflètent, chacune à sa façon, un rayon de la sagesse et de la bonté infinies de Dieu. C'est pour cela que l'homme doit respecter la bonté propre de chaque créature pour éviter un usage désordonné des choses, qui méprise le Créateur et entraîne des conséquences néfastes pour les hommes et pour leur ambiance.

§340
L'interdépendance des créatures est voulue par Dieu. Le soleil et la lune, le cèdre et la petite fleur, l'aigle et le moineau: les innombrables diversités et inégalités signifient qu'aucune créature ne se suffit à elle-même, qu'elles n'existent qu'en dépendance les unes des autres, pour se compléter mutuellement, au service les unes des autres.

§341
La beauté de l'univers: L'ordre et l'harmonie du monde créé résultent de la diversité des êtres et des relations qui existent entre eux. L'homme les découvre progressivement comme lois de la nature. Ils font l'admiration des savants. La beauté de la création reflète l'infinie beauté du Créateur. Elle doit inspirer le respect et la soumission de l'intelligence de l'homme et de sa volonté.

§342
La hiérarchie des créatures est exprimée par l'ordre des «six jours», qui va du moins parfait au plus parfait. Dieu aime toutes ses créatures (cf. Ps 145, 9), il prend soin de chacune, même des passereaux. Néanmoins, Jésus dit: «Vous valez mieux qu'une multitude de passereaux» (Lc 12, 6-7), ou encore: «Un homme vaut plus qu'une brebis» (Mt 12, 12).

§343
L'homme est le sommet de l'oeuvre de la création. Le récit inspiré l'exprime en distinguant nettement la création de l'homme de celle des autres créatures (cf. Gn 1, 26).

§344
Il existe une solidarité entre toutes les créatures du fait qu'elles ont toutes le même Créateur, et que toutes sont ordonnées à sa gloire:

Loué sois-tu, Seigneur, dans toutes tes créatures,

spécialement messire le frère Soleil,

par qui tu nous donnes le jour la lumière;

il est beau, rayonnant d'une grande splendeur,

et de toi, le Très-Haut, il nous offre le symbole. ...

Loué sois-tu, mon Seigneur, pour soeur Eau,

qui est très utile et très humble,

précieuse et chaste. ...

Loué sois-tu, mon Seigneur, pour soeur notre mère la Terre

qui nous porte et nous nourrit,

qui produit la diversité des fruits

avec les fleurs diaprées et les herbes. ...

Louez et bénissez mon Seigneur,

rendez-lui grâce et servez-le

en toute humilité.

(S. François d'Assise, cant.)

§345
Le Sabbat -- fin de l'oeuvre des «six jours». Le texte sacré dit que «Dieu conclut au septième jour l'ouvrage qu'Il avait fait» et qu'ainsi «le ciel et la terre furent achevés», et que Dieu, au septième jour, «chôma» et qu'Il sanctifia et bénit ce jour (Gn 2, 1-3). Ces paroles inspirées sont riches en enseignements salutaires:

§346
Dans la création Dieu a posé un fondement et des lois qui demeurent stables (cf. He 4, 3-4), sur lesquels le croyant pourra s'appuyer avec confiance, et qui lui seront le signe et le gage de la fidélité inébranlable de l'alliance de Dieu (cf. Jr 31, 35-37; 33, 19-26). De son côté, l'homme devra rester fidèle à ce fondement et respecter les lois que le Créateur y a inscrites.

§347
La création est faite en vue du Sabbat et donc du culte et de l'adoration de Dieu. Le culte est inscrit dans l'ordre de la création (cf. Gn 1, 14). «Ne rien préférer au culte de Dieu», dit la règle de S. Benoît (reg. 43, 3), indiquant ainsi le juste ordre des préoccupations humaines.

§348
Le Sabbat est au coeur de la loi d'Israël. Garder les commandements, c'est correspondre à la sagesse et à la volonté de Dieu exprimées dans son oeuvre de création.

§349
Le huitième jour. Mais pour nous, un jour nouveau s'est levé: le jour de la Résurrection du Christ. Le septième jour achève la première création. Le huitième jour commence la nouvelle création. Ainsi, l'oeuvre de la création culmine en l'oeuvre plus grande de la rédemption. La première création trouve son sens et son sommet dansla nouvelle création dans le Christ, dont la splendeur dépasse celle de la première (cf. MR, Vigile Pascale 24: prière après la première lecture).

EN BREF

§350
Les anges sont des créatures spirituelles qui glorifient Dieu sans cesse et qui servent ses desseins salvifiques envers les autres créatures: «Les anges concourent à tout ce qui est bon pour nous» (S. Thomas d'A., s. th. 1, 114, 3, ad 3).

§351
Les anges entourent le Christ, leur Seigneur. Ils le servent particulièrement dans l'accomplissement de sa mission salvifique envers les hommes.

§352
L'Église vénère les anges qui l'aident dans son pèlerinage terrestre. et qui protègent tout être humain.

§353
Dieu a voulu la diversité de ses créatures et leur bonté propre, leur interdépendance et leur ordre. Il a destiné toutes les créatures matérielles au bien du genre humain. L'homme, et toute la création à travers lui, est destiné à la gloire de Dieu.

§354
Respecter les lois inscrites dans la création et les rapports qui dérivent de la nature des choses, est un principe de sagesse et un fondement de la morale.

Paragraphe 6. L'HOMME

§355
«Dieu créa l'homme à son image, à l'image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa» (Gn 1, 27). L'homme tient une place unique dans la création: il est «à l'image de Dieu» (I); dans sa propre nature il unit le monde spirituel et le monde matériel (II); il est créé «homme et femme» (III); Dieu l'a établi dans son amitié (IV).

I. «A l'image de Dieu»

§356
De toutes les créatures visibles, seul l'homme est «capable de connaître et d'aimer son Créateur» (GS 12, § 3); il est «la seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même» (GS 24, § 3);lui seul est appelé à partager, par la connaissance et l'amour, la vie de Dieu. C'est à cette fin qu'il a été créé, et c'est là la raison fondamentale de sa dignité:

Quelle raison T'a fait constituer l'homme en si grande dignité? L'amour inestimable par lequel Tu as regardé en Toi-même Ta créature, et Tu T'es épris d'elle; car c'est par amour que Tu l'as créée, c'est par amour que Tu lui as donné un être capable de goûter Ton Bien éternel (Ste. Catherine de Sienne, dial. 4, 13: ed. G. Cavallini [Roma 1995] p. 43).

§357
Parce qu'il est à l'image de Dieu l'individu humain a la dignité de personne: il n'est pas seulement quelque chose, mais quelqu'un. Il est capable de se connaître, de se posséder et de librement se donner et entrer en communion avec d'autres personnes, et il est appelé, par grâce, à une alliance avec son Créateur, à Lui offrir une réponse de foi et d'amour que nul autre ne peut donner à sa place.

§358
Dieu a tout créé pour l'homme (cf. GS 12, § 1; 24, § 3; 39, § 1), mais l'homme a été créé pour servir et aimer Dieu et pour Lui offrir toute la création:

Quel est donc l'être qui va venir à l'existence entouré d'une telle considération? C'est l'homme, grande et admirable figure vivante, plus précieux aux yeux de Dieu que la création toute entière: c'est l'homme, c'est pour lui qu'existent le ciel et la terre et la mer et la totalité de la création, et c'est à son salut que Dieu a attaché tant d'importance qu'il n'a même pas épargné son Fils unique pour lui. Car Dieu n'a pas eu de cesse de tout mettre en oeuvre pour faire monter l'homme jusqu'à lui et le faire asseoir à sa droite (S. Jean Chrysostome, serm. in Gen. 2, 1: PG 54, 587D-588A).

§359
«En réalité, c'est seulement dans le mystère du Verbe incarné que s'éclaire véritablement le mystère de l'homme» (GS 22, § 1):

Saint Paul nous apprend que deux hommes sont à l'origine du genre humain: Adam et le Christ ... Le premier Adam, dit-il, a été créé comme un être humain qui a reçu la vie; le dernier est un être spirituel qui donne la vie. Le premier a été créé par le dernier, de qui il a reçu l'âme qui le fait vivre ... Le second Adam a établi son image dans le premier Adam alors qu'il le modelait. De là vient qu'il en a endossé le rôle et reçu le nom, afin de ne pas laisser perdre ce qu'il avait fait à son image. Premier Adam, dernier Adam: le premier a commencé, le dernier ne finira pas. Car le dernier est véritablement le premier, comme il l'a dit lui-même: «Je suis le Premier et le Dernier» (S. Pierre Chrysologue, serm. 117, 1-2: PL 52, 520B).

§360
Grâce à la communauté d'origine le genre humain forme une unité. Car Dieu «a fait sortir d'une souche unique toute la descendance des hommes» (Ac 17, 26; cf. Tb 8, 6):

Merveilleuse vision qui nous fait contempler le genre humain dans l'unité de son origine en Dieu (...); dans l'unité de sa nature, composée pareillement chez tous d'un corps matériel et d'une âme spirituelle; dans l'unité de sa fin immédiate et de sa mission dans le monde; dans l'unité de son habitation: la terre, des biens de laquelle tous les hommes, par droit de nature, peuvent user pour soutenir et développer la vie; unité de sa fin surnaturelle: Dieu même, à qui tous doivent tendre; dans l'unité des moyens pour atteindre cette fin; (...) dans l'unité de son rachat opéré pour tous par le Christ (Pie XII, enc. «Summi pontificatus»; cf. NA 1).

§361
«Cette loi de solidarité humaine et de charité» (Ibid.), sans exclure la riche variété des personnes, des cultures et des peuples, nous assure que tous les hommes sont vraiment frères.

II. «Un de corps et d'âme»

§362
La personne humaine, créée à l'image de Dieu, est un être à la fois corporel et spirituel. Le récit biblique exprime cette réalité avec un langage symbolique, lorsqu'il affirme que «Dieu modela l'homme avec la glaise du sol; il insuffla dans ses narines une haleine de vie et l'homme devint un être vivant» (Gn 2, 7). L'homme tout entier est donc voulu par Dieu.

§363
Souvent, le terme âme désigne dans l'Écriture Sainte la vie humaine (cf. Mt 16, 25-26; Jn 15, 13) ou toute la personne humaine (cf. Ac 2, 41). Mais il désigne aussi ce qu'il y a de plus intime en l'homme (cf. Mt 26, 38; Jn 12, 27) et de plus grande valeur en lui (cf. Mt 10, 28; 2 M 6, 30), ce par quoi il est plus particulièrement image de Dieu: «âme» signifie le principe spirituel en l'homme.

§364
Le corps de l'homme participe à la dignité de l'«image de Dieu «: il est corps humain précisément parce qu'il est animé par l'âme spirituelle, et c'est la personne humaine toute entière qui est destinée à devenir, dans le Corps du Christ, le Temple de l'Esprit (cf. 1 Co 6, 19-20; 15, 44-45):

Corps et âme, mais vraiment un, l'homme, dans sa condition corporelle, rassemble en lui-même les éléments du monde matériel qui trouvent ainsi, en lui, leur sommet, et peuvent librement louer leur Créateur. Il est donc interdit à l'homme de dédaigner la vie corporelle. Mais au contraire il doit estimer et respecter son corps qui a été créé par Dieu et qui doit ressusciter au dernier jour (GS 14, § 1).

§365
L'unité de l'âme et du corps est si profonde que l'on doit considérer l'âme comme la «forme» du corps (cf. Cc. Vienne en 1312: DS 902); c'est-à-dire, c'est grâce à l'âme spirituelle que le corps constitué de matière est un corps humain et vivant; l'esprit et la matière, dans l'homme, ne sont pas deux natures unies, mais leur union forme une unique nature.

§366
L'Église enseigne que chaque âme spirituelle est immédiatement créée par Dieu (cf. Pie XII, enc. «Humani generis», 1950: DS 3896; SPF 8) -- elle n'est pas «produite» par les parents -- ; elle nous apprend aussi qu'elle est immortelle (cf. Cc. Latran V en 1513: DS 1440): elle ne périt pas lors de sa séparation du corps dans la mort, et s'unira de nouveau au corps lors de la résurrection finale.

§367
Parfois il se trouve que l'âme soit distinguée de l'esprit. Ainsi S. Paul prie pour que notre «être tout entier, l'esprit, l'âme et le corps» soit gardé sans reproche à l'Avènement du Seigneur (1 Th 5, 23). L'Église enseigne que cette distinction n'introduit pas une dualité dans l'âme (Cc. Constantinople IV en 870: DS 657). «Esprit» signifie que l'homme est ordonné dès sa création à sa fin surnaturelle (Cc. Vatican I: DS 3005; cf. GS 22, § 5), et que son âme est capable d'être surélevée gratuitement à la communion avec Dieu (cf. Pie XII, Enc. «Humani generis», 1950: DS 3891).

§368
La tradition spirituelle de l'Église insiste aussi sur le coeur, au sens biblique de «fond de l'être» (Jr 31, 33) où la personne se décide ou non pour Dieu (cf. Dt 6, 5; 29, 3; Is 29, 13; Ez 36, 26; Mt 6, 21; Lc 8, 15; Rm 5, 5).

III. «Homme et femme il les créa»

Égalité et différence voulues par Dieu

§369
L'homme et la femme sont créés, c'est-à-dire ils sont voulus par Dieu: dans une parfaite égalité en tant que personnes humaines, d'une part, et d'autre part dans leur être respectif d'homme et de femme. «Être homme», «être femme» est une réalité bonne et voulue par Dieu: l'homme et la femme ont une dignité inamissible qui leur vient immédiatement de Dieu leur créateur (cf. Gn 2, 7. 22). L'homme et la femme sont, avec une même dignité, «à l'image de Dieu». Dans leur «être-homme» et leur «être-femme», ils reflètent la sagesse et la bonté du Créateur.

§370
Dieu n'est aucunement à l'image de l'homme. Il n'est ni homme ni femme. Dieu est pur esprit en lequel il n'y a pas place pour la différence des sexes. Mais les «perfections» de l'homme et de la femme reflètent quelque chose de l'infinie perfection de Dieu: celles d'une mère (cf. Is 49, 14-15; 66, 13; Ps 130, 2-3) et celles d'un père et époux (cf. Os 11, 1-4; Jr 3, 4-19).

«L'un pour l'autre» -- «une unité à deux»

§371
Créés ensemble, l'homme et la femme sont voulus par Dieu l'un pour l'autre. La Parole de Dieu nous le fait entendre par divers traits du texte sacré. «Il n'est pas bon que l'homme soit seul. Il faut que je lui fasse une aide qui lui soit assortie» (Gn 2, 18). Aucun des animaux ne peut être ce «vis-à-vis» de l'homme (Gn 2, 19-20). La femme que Dieu «façonne» de la côte tirée de l'homme et qu'il amène à l'homme, provoque de la part de l'homme un cri d'admiration, une exclamation d'amour et de communion: «C'est l'os de mes os et la chair de ma chair» (Gn 2, 23). L'homme découvre la femme comme un autre «moi», de la même humanité.

§372
L'homme et la femme sont faits «l'un pour l'autre «: non pas que Dieu ne les aurait faits qu'«à moitié» et «incomplets «; Il les a créés pour une communion de personnes, en laquelle chacun peut être «aide» pour l'autre parce qu'ils sont à la fois égaux en tant que personnes («os de mes os...») et complémentaires en tant que masculin et féminin (MD 7). Dans le mariage, Dieu les unit de manière que, en formant «une seule chair» (Gn 2, 24), ils puissent transmettre la vie humaine: «Soyez féconds, multipliez, emplissez la terre» (Gn 1, 28). En transmettant à leur descendants la vie humaine, l'homme et la femme comme époux et parents, coopèrent d'une façon unique à l'oeuvre du Créateur (cf. GS 50, § 1).

§373
Dans le dessein de Dieu, l'homme et la femme ont la vocation de «soumettre» la terre (cf. Gn 1, 28) comme «intendants» de Dieu. Cette souveraineté ne doit pas être une domination arbitraire et destructrice. A l'image du Créateur «qui aime tout ce qui existe» (Sg 11, 24), l'homme et la femme sont appelés à participer à la Providence divine envers les autres créatures. De là, leur responsabilité pour le monde que Dieu leur a confié.

IV. L'homme au Paradis

§374
Le premier homme n'a pas seulement été créé bon, mais il a été constitué dans une amitié avec son Créateur et une harmonie avec lui-même et avec la création autour de lui telles qu'elles ne seront dépassées que par la gloire de la nouvelle création dans le Christ.

§375
L'Église, en interprétant de manière authentique le symbolisme du langage biblique à la lumière du Nouveau Testament et de la Tradition, enseigne que nos premiers parents Adam et Eve ont été constitué dans un état «de sainteté et de justice originelle» (Cc. Trente: DS 1511). Cette grâce de la sainteté originelle était une «participation à la vie divine» (LG 2).

§376
Par le rayonnement de cette grâce toutes les dimensions de la vie de l'homme étaient confortées. Tant qu'il demeurait dans l'intimité divine, l'homme ne devait ni mourir (cf. Gn 2, 17; 3, 19), ni souffrir (cf. Gn 3, 16). L'harmonie intérieure de la personne humaine, l'harmonie entre l'homme et la femme (cf. Gn 2, 25), enfin l'harmonie entre le premier couple et toute la création constituait l'état appelé «justice originelle».

§377
La «maîtrise» du monde que Dieu avait accordée à l'homme dès le début, se réalisait avant tout chez l'homme lui-même comme maîtrise de soi. L'homme était intact et ordonné dans tout son être, parce que libre de la triple concupiscence (cf. 1 Jn 2, 16) qui le soumet aux plaisirs des sens, à la convoitise des biens terrestres et à l'affirmation de soi contre les impératifs de la raison.

§378
Le signe de la familiarité avec Dieu, c'est que Dieu le place dans le jardin (cf. Gn 2, 8). Il y vit «pour cultiver le sol et le garder» (Gn 2, 15): le travail n'est pas une peine (cf. Gn 3, 17-19), mais la collaboration de l'homme et de la femme avec Dieu dans le perfectionnement de la création visible.

§379
C'est toute cette harmonie de la justice originelle, prévue pour l'homme par le dessein de Dieu, qui sera perdu par le péché de nos premiers parents.

EN BREF

§380
«Dieu, Tu as fait l'homme à ton image et tu lui as confié l'univers, afin qu'en Te servant, toi, son Créateur, il règne sur la création» (MR, prière eucharistique IV, 118).

§381
L'homme est prédestiné à reproduire l'image du Fils de Dieu fait homme -- «image du Dieu invisible» (Col 1, 15) -- afin que le Christ soit le premier-né d'une multitude de frères et de soeurs (cf. Ep 1, 3-6; Rm 8, 29).

§382
L'homme est «un de corps et d'âme» (GS 14, § 1). La doctrine de la foi affirme que l'âme spirituelle et immortelle est créée immédiatement par Dieu.

§383
«Dieu n'a pas créé l'homme solitaire: dès l'origine, 'il les créa homme et femme' (Gn 1, 27); leur société réalise la première forme de communion entre personnes» (GS 12, § 4).

§384
La révélation nous fait connaître l'état de sainteté et de justice originelles de l'homme et de la femme avant le péché: de leur amitié avec Dieu découlait la félicité de leur existence au paradis.

Paragraphe 7. LA CHUTE

§385
Dieu est infiniment bon et toutes ses oeuvres sont bonnes. Cependant, personne n'échappe à l'expérience de la souffrance, des maux dans la nature -- qui apparaissent comme liés aux limites propres des créatures --, et surtout à la question du mal moral. D'où vient le mal? «Je cherchais d'où vient le mal et je ne trouvais pas de solution» dit S. Augustin (conf. 7, 7, 11), et sa propre quête douloureuse ne trouvera d'issue que dans sa conversion au Dieu vivant. Car «le mystère de l'iniquité» (2 Th 2, 7) ne s'éclaire qu'à la lumière du mystère de la piété (cf. 1 Tm 3, 16). La révélation de l'amour divin dans le Christ a manifesté à la fois l'étendue du mal et la surabondance de la grâce (cf. Rm 5, 20). Nous devons donc considérer la question de l'origine du mal en fixant le regard de notre foi sur Celui qui, seul, en est le Vainqueur (cf. Lc 11, 21-22; Jn 16, 11; 1 Jn 3, 8).

I. La où le péché a abondé, la grâce a surabondé

La réalité du péché

§386
Le péché est présent dans l'histoire de l'homme: il serait vain de tenter de l'ignorer ou de donner à cette obscure réalité d'autres noms. Pour essayer de comprendre ce qu'est le péché, il faut d'abord reconnaître le lien profond de l'homme avec Dieu, car en dehors de ce rapport, le mal du péché n'est pas démasqué dans sa véritable identité de refus et d'opposition face à Dieu, tout en continuant à peser sur la vie de l'homme et sur l'histoire.

§387
La réalité du péché, et plus particulièrement du péché des origines, ne s'éclaire qu'à la lumière de la Révélation divine. Sans la connaissance qu'elle nous donne de Dieu on ne peut clairement reconnaître le péché, et on est tenté de l'expliquer uniquement comme un défaut de croissance, comme une faiblesse psychologique, une erreur, la conséquence nécessaire d'une structure sociale inadéquate, etc. C'est seulement dans la connaissance du dessein de Dieu sur l'homme que l'on comprend que le péché est un abus de la liberté que Dieu donne aux personnes créées pour qu'elles puissent l'aimer et s'aimer mutuellement.

Le péché originel -- une vérité essentielle de la foi

§388
Avec la progression de la Révélation est éclairée aussi la réalité du péché. Bien que le Peuple de Dieu de l'Ancien Testament ait connu d'une certaine manière la condition humaine à la lumière de l'histoire de la chute narrée dans la Genèse, il ne pouvait pas atteindre la signification ultime de cette histoire, qui se manifeste seulement à la lumière de la Mort et de la Résurrection de Jésus-Christ (cf. Rm 5, 12-21). Il faut connaître le Christ comme source de la grâce pour connaître Adam comme source du péché. C'est l'Esprit-Paraclet, envoyé par le Christ ressuscité, qui est venu «confondre le monde en matière de péché» (Jn 16, 8) en révélant Celui qui en est le Rédempteur.

§389
La doctrine du péché originel est pour ainsi dire «le revers» de la Bonne Nouvelle que Jésus est le Sauveur de tous les hommes, que tous ont besoin du salut et que le salut est offert à tous grâce au Christ. L'Église qui a le sens du Christ (cf. 1 Co 2, 16) sait bien qu'on ne peut pas toucher à la révélation du péché originel sans porter atteinte au mystère du Christ.

Pour lire le récit de la chute

§390
Le récit de la chute (Gn 3) utilise un langage imagé, mais il affirme un événement primordial, un fait qui a eu lieu au commencement de l'histoire de l'homme (cf. GS 13, § 1). La Révélation nous donne la certitude de foi que toute l'histoire humaine est marquée par la faute originelle librement commise par nos premiers parents (cf. Cc. Trente: DS 1513; Pie XII: DS 3897; Paul VI, discours 11 juillet 1966).

II. La chute des anges

§391
Derrière le choix désobéissant de nos premiers parents il y a une voix séductrice, opposée à Dieu (cf. Gn 3, 4-5) qui, par envie, les fait tomber dans la mort (cf. Sg 2, 24). L'Écriture et la Tradition de l'Église voient en cet être un ange déchu, appelé Satan ou diable (cf. Jn 8, 44; Ap 12, 9). L'Église enseigne qu'il a été d'abord un ange bon, fait par Dieu. «Le diable et les autres démons ont certes été créés par Dieu naturellement bons, mais c'est eux qui se sont rendus mauvais» (Cc. Latran IV en 1215: DS 800).

§392
L'Écriture parle d'un péché de ces anges (cf. 2 P 2, 4). Cette «chute» consiste dans le choix libre de ces esprits créés, qui ont radicalement et irrévocablement refusé Dieu et son Règne. Nous trouvons un reflet de cette rébellion dans les paroles du tentateur à nos premiers parents: «Vous deviendrez comme Dieu» (Gn 3, 5). Le diable est «pécheur dès l'origine» (1 Jn 3, 8), «père du mensonge» (Jn 8, 44).

§393
C'est le caractère irrévocable de leur choix, et non un défaut de l'infinie miséricorde divine, qui fait que le péché des anges ne peut être pardonné. «Il n'y a pas de repentir pour eux après la chute, comme il n'y a pas de repentir pour les hommes après la mort» (S. Jean Damascène, f. o. 2, 4: PG 94, 877C).

§394
L'Écriture atteste l'influence néfaste de celui que Jésus appelle «l'homicide dès l'origine» (Jn 8, 44), et qui a même tenté de détourner Jésus de la mission reçue du Père (cf. Mt 4, 1-11). «C'est pour détruire les oeuvres du diable que le Fils de Dieu est apparu» (1 Jn 3, 8). La plus grave en conséquences de ces oeuvres a été la séduction mensongère qui a induit l'homme à désobéir à Dieu.

§395
La puissance de Satan n'est cependant pas infinie. Il n'est qu'une créature, puissante du fait qu'il est pur esprit, mais toujours une créature: il ne peut empêcher l'édification du Règne de Dieu. Quoique Satan agisse dans le monde par haine contre Dieu et son Royaume en Jésus-Christ, et quoique son action cause de graves dommages -- de nature spirituelle et indirectement même de nature physique -- pour chaque homme et pour la société, cette action est permise par la divine Providence qui avec force et douceur dirige l'histoire de l'homme et du monde. La permission divine de l'activité diabolique est un grand mystère, mais «nous savons que Dieu fait tout concourir au bien de ceux qui l'aiment» (Rm 8, 28).

III. Le péché originel

L'épreuve de la liberté

§396
Dieu a créé l'homme à son image et l'a constitué dans son amitié. Créature spirituelle, l'homme ne peut vivre cette amitié que sur le mode de la libre soumission à Dieu. C'est ce qu'exprime la défense faite à l'homme de manger de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, «car du jour où tu en mangeras, tu mourras» (Gn 2, 17). «L'arbre de la connaissance du bien et du mal» (Gn 2, 17) évoque symboliquement la limite infranchissable que l'homme, en tant que créature, doit librement reconnaître et respecter avec confiance. L'homme dépend du Créateur, il est soumis aux lois de la création et aux normes morales qui règlent l'usage de la liberté.

Le premier péché de l'homme

§397
L'homme, tenté par le diable, a laissé mourir dans son coeur la confiance envers son créateur (cf. Gn 3, 1-11) et, en abusant de sa liberté, a désobéi au commandement de Dieu. C'est en cela qu'a consisté le premier péché de l'homme (cf. Rm 5, 19). Tout péché, par la suite, sera une désobéissance à Dieu et un manque de confiance en sa bonté.

§398
Dans ce péché, l'homme s'est préféré lui-même à Dieu, et par là même, il a méprisé Dieu: il a fait choix de soi-même contre Dieu, contre les exigences de son état de créature et dès lors contre son propre bien. Constitué dans un état de sainteté, l'homme était destiné à être pleinement «divinisé» par Dieu dans la gloire. Par la séduction du diable, il a voulu «être comme Dieu» (cf. Gn 3, 5), mais «sans Dieu, et avant Dieu, et non pas selon Dieu» (S. Maxime le Confesseur, ambig.: PG 91, 1156C).

§399
L'Écriture montre les conséquences dramatiques de cette première désobéissance. Adam et Eve perdent immédiatement la grâce de la sainteté originelle (cf. Rm 3, 23). Ils ont peur de ce Dieu (cf. Gn 3, 9-10) dont ils ont conçu une fausse image, celle d'un Dieu jaloux de ses prérogatives (cf. Gn 3, 5).

Catéchisme de l'Église catholique © Libreria Editrice Vaticana 1992.

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